Je reste, je l’avoue, très attachée à
cette tradition qui, une fois l’an, nous fait échanger souhaits et vœux
aimables.
Mais au fait, ces deux mots –
souhaits, vœux – sont-ils interchangeables ?
Je vous souhaite, du fond du cœur, de
vivre une belle et bonne année 2011. Je vous souhaite bien sincèrement d’être
épargnés par les maux et les malheurs. Bref, je vous souhaite 365 jours sous le
signe du bonheur.
Si je le pouvais, je ferais vœu de
vous offrir tout ce bonheur. Je ferais vœu, c'est-à-dire je m’engagerais pour
que se réalisent à votre profit tous ces souhaits. Mais voilà : je suis,
comme vous, impuissante à maîtriser le cours de la nature.
Si sincères soient mes souhaits, ils
relèvent de l’espérance, cette petite fille fragile et tenace. La petite fille
sait que cette année comme les précédentes, il y aura des jours lumineux, mais
aussi des orages et du brouillard ; des rires mais aussi des larmes ;
des joies intenses mais aussi, hélas, sans doute du malheur. Cela n’empêche pas
la petite fille d’espérer très fort, de parier envers et contre tout sur la vie
et d’offrir ses souhaits comme des cadeaux. Ses vœux, elle le sait, sont aussi
lumineux et fugaces que les étoiles filantes…
Et pourtant, quelque chose résiste et
insiste. Quelque chose en moi refuse d’être un simple jouet des circonstances.
Une de mes amies, italienne, me
racontait l’autre jour comment, au temps de son enfance dans les Abruzzes, on
fêtait le nouvel an. On cherchait dans la maison tous les objets abîmés, hors
d’usage… et on les jetait par la fenêtre ! Une assiette fêlée ? Un
torchon déchiré ? Un bougeoir déglingué ? Hop ! Par la
fenêtre ! C’était, me disait-elle, une façon d’exprimer qu’on se
débarrasse de ce qui encombre, de ce qui est moche, pour recommencer au premier
janvier la vie à neuf.
Cela n’est pas sans rappeler les
« bonnes résolutions » que tant d’entre nous prennent en cette
période. On sait qu’elles ne tiennent guère plus longtemps que les aiguilles du
sapin… Mais si on commençait par faire un peu de place dans nos armoires
intérieures, comme dans les Abruzzes ? Si on décidait d’envoyer valdinguer
ce qui, en nous, est noué, de guingois, qu’on ne garde que par habitude parce
qu’on ne le voit même plus ?
Cette manie de se plaindre du temps
qu’il fait ? Hop ! Par la fenêtre ! Cette crainte de sourire à
des inconnus ? Par la fenêtre ! Ce besoin de plaire à tout le
monde ? Par la fenêtre !
Chacune et chacun de nous a ses
casseroles cabossées, ses godasses hors d’usage. Chacune et chacun sait ce
qu’il serait tellement libérateur de balancer par la fenêtre… Libérateur, oui,
parce que quand on décide soi-même de faire le ménage, on réalise qu’on peut
agir sur sa propre vie, qu’on n’est pas un jouet aux mains du destin.
Alors, ce que je vous, ce que je nous
souhaite en ce début d’année, c’est d’oser ouvrir la fenêtre et de jeter, sans
regret ni remords, un de ces vieux machins qui encombrent le cœur. Ca
fera de la place pour les rencontres… et le bonheur.