Je vais vous raconter une histoire belle comme un conte de Noël. Une
histoire de naissance – mais il n'y a pas de crèche ni de bébé. Une histoire avec
des anges, mais ils n'ont pas d'ailes et ils se servent du courrier
électronique…
Tout commence le 19 août. Estelle, 41 ans, pédagogue, s'effondre au
cours d'une conférence qu'elle donne. Crise cardiaque. Elle est prise en charge
très rapidement, mais se retrouve néanmoins placée sous coma artificiel. Dix
jours plus tard, alors qu'elle est toujours inconsciente, Ignace, son mari
ouvre un blog où tous les amis et connaissances pourront suivre, jour après
jour, l'évolution d'Estelle. Il demande qu'on laisse sur le blog des messages
positifs, encourageants, qu'il lira à sa femme. Sitôt demandé, sitôt fait : les
messages pleuvent comme les étoiles dans un beau ciel d'été. Ignace, qui jubile
au moindre mouvement de paupière – fût-il inconscient, Ignace lit chaque jour à
Estelle les mots d'amitié, de tendresse, d'encouragement que lui adressent ses
amis, ses connaissances, et même des gens qui la connaissent à peine.
Pourtant, les nouvelles ne sont pas bonnes : un éminent médecin annonce qu'en
raison des lésions importantes subies par son cerveau, Estelle est dans un coma
végétatif. Le pronostic d'évolution est donc défavorable… Le médecin se déclare
certain de son diagnostic à 98 % - laissant (je cite) 2% à l'inexplicable et à
l'inconnu.
Ignace, pour autant, ne lâche pas prise : il nous demande, il nous conjure
de transformer la douleur en énergie positive – seule chose dont Estelle a
besoin. Cela peut paraître insensé : à quoi bon continuer à envoyer des
messages à une personne déclarée en coma végétatif, dont on prépare le
transfert en, soin palliatifs ? Ne faudrait-il pas, à ce moment, consentir à la
souffrance, se préparer aux adieux ? Regarder la réalité en face, comme on dit
?